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Gail Ouellette, Ph.D. CGAC, Généticienne/conseillère en génétique, Regroupement québécois des maladies orphelines Québec, Canada http://www.linkedin.com/profile/view?id=108787930&trk=hb_tab_pro_top Site web: www.rqmo.org Voir notre page Facebook

lundi 10 juin 2013


DE NOMBREUX QUÉBÉCOIS ATTEINTS DE MALADIES RARES N’ONT PAS ACCÈS À DES TRAITEMENTS DISPONIBLES
 
 
Un autre événement qui a retenu l’attention du Regroupement québécois des maladies orphelines  la semaine dernière: la publication de la mise à jour des listes de médicaments remboursés par la RAMQ. L’INESSS (Institut national d’excellence en santé et en services sociaux) est l’organisme québécois qui évalue les médicaments pour remboursement par le Régime général d’assurance médicament ou pour utilisation dans les hôpitaux. Le lundi 3 juin, l’INESSS a publié ses plus récentes décisions concernant des médicaments soumis par des fabricants. Au moins quatre médicaments pour des maladies rares faisaient partie de cette liste. Trois d’entre eux ont eu un avis de refus (ils ne seront donc pas inclus sur les listes de médicaments remboursés) et pour le quatrième médicament, la décision a été remise à plus tard pour la cinquième fois!

Pour être soumis à l’INESSS, ces médicaments ont d’abord été approuvés pour la mise en marché par Santé Canada. Enfin, c’est le ministre de la Santé du Québec qui donne son approbation finale ou non aux décisions de l’INESSS.
L'un des médicaments orphelins refusé est la vélaglucérase alfa (VPRIVMC ) pour le traitement de la maladie de Gaucher de type I. Il constitue le troisième traitement approuvé par Santé Canada pour cette maladie. Tous les trois ont été refusés pour remboursement au Québec. La raison donnée pour le refus de remboursement de la vélaglucérase alfa est qu’elle ne répondrait pas aux critères de l’INESSS pour sa valeur thérapeutique. Le problème c’est que la méthode d’évaluation utilisée et qui a été établie pour les maladies communes ne peut pas s’appliquer aux traitements pour les maladies rares. Cela a été reconnu clairement en 2007, lorsque dans sa Politique du médicament, le Québec a affirmé la nécessité d’établir un cadre d’évaluation spécifique pour les maladies rares. En 2013, on attend toujours ce cadre.


D’ailleurs, dans son rapport l’INESSS présente des facteurs propres à la maladie contribuant à l’insuffisance des données (petits échantillons, considérations éthiques, lenteur de l’effet du médicament, etc.) et il affirme que cette insuffisance de données ne permet pas d’établir la valeur thérapeutique de la vélaglucérase alfa, malgré le fait qu’il concède que ce médicament est efficace pour le traitement de la maladie de Gaucher sur la base de plusieurs paramètres mesurés dans les études. De plus, on dévoile dans le rapport que plusieurs membres du comité d’évaluation se sont abstenus de voter en raison de leur incapacité à se prononcer à l’intérieur du cadre d’évaluation utilisé actuellement. Ce comité perd son temps en utilisant la méthode d’évaluation actuelle : depuis 2004, six médicaments pour le même type de maladie que la maladie de Gaucher ont été refusés pour remboursement (sauf un qui est remboursé pour les bébés diagnostiqués avec la maladie de Pompe avant un an de vie, mais pas pour les autres personnes atteintes). Pourtant, cela ne veut pas dire que ces médicaments ne sont pas efficaces chez certaines personnes. Tous les patients devraient avoir l’occasion de les essayer au moins. De plus, on observe des disparités entre les provinces du Canada quant à l’évaluation et à l’accès pour un même médicament. Il est donc urgent de discuter et de mettre en place un autre système pour évaluer les médicaments orphelins au Québec.


Le deuxième médicament refusé est l’ivacaftor pour le traitement de la fibrose kystique. Il est utilisé pour traiter les enfants de 6 ans et plus ayant une mutation spécifique dans le gène associé à la fibrose kystique. Ces enfants représenteraient seulement environ 3 % des individus atteints de la fibrose kystique. Ce médicament innovateur est le premier traitement pour la fibrose kystique qui s’attaque directement au mécanisme de la maladie. Le comité de l’INESSS a reconnu la valeur thérapeutique de l’ivacaftor. Cependant, c’est en calculant le rapport du coût à l’efficacité que le médicament ne passe pas le test pour le remboursement. Que vont faire les personnes atteintes de maladies rares si leurs traitements sont coûteux du fait que ce sont des maladies rares, que les thérapies sont souvent innovatrices et que le marché de vente est restreint pour les compagnies qui les fabriquent? Il faut trouver des solutions, tant du côté des pharmaceutiques que du côté du gouvernement payeur, car une partie de la population n’a jamais accès aux traitements disponibles et approuvés pour leur maladie.
 

Le troisième médicament qui a essuyé un refus est le pirfénidone (EsbrietTM) pour le traitement de la fibrose pulmonaire, une maladie plus fréquente que les trois autres, mais néanmoins considérée rare. L’INESSS estime qu’il ne satisfait pas les critères de la valeur thérapeutique. Les deux études présentées par la compagnie pharmaceutique étaient contradictoires. L’INESSS considérait que le nombre de patients participant à l’étude (n= 170) était acceptable, mais il n’est peut-être pas suffisant pour montrer un effet cohérent.

Pour ce qui est du quatrième médicament, le dichlorhydrate de saproptérine (KuvanTM) pour le traitement de la phénylcétonurie, la décision de l’INESSS a été remise pour la cinquième fois. Il a été accepté comme médicament d’exception pour les femmes enceintes atteintes de la maladie, mais toujours pas pour l’ensemble des enfants et adultes atteints de la phénylcétonurie. Là encore, c’est le premier médicament développé et approuvé pour cette maladie qui est habituellement traitée par une diète très sévère sans protéines et avec des aliments spéciaux. Ce traitement est tout un poids pour l’enfant atteint et sa famille et souvent les adultes stoppent la diète et en subissent des séquelles.


Tant que l’INESSS et le ministre de la Santé du Québec ne changeront pas les méthodes d’évaluation de la valeur thérapeutique des médicaments orphelins et qu’ils n’appliqueront pas autrement les critères pharmacoéconomiques, les personnes atteintes de maladies rares auront peu d’espoir d’avoir un accès équitable à des traitements sécuritaires approuvés. Pourquoi ces dernières seraient-elles traitées différemment des personnes atteintes de maladies communes?

Le RQMO a écrit une lettre au ministre de la Santé et des services sociaux, le Dr Réjean Hébert, à ce sujet. Voir communiqué de presse :

Qu'en pensez-vous? Laissez un commentaire ci-dessous.

Informations supplémentaires :

Pour consulter les décisions concernant les médicaments mentionnés dans ce blogue, voir le site de l’INESSS : Médicaments évalués, liste du 3 juin 2013


Pour en apprendre plus sur le Processus et les critères d’évaluation de l’INESSS



 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

jeudi 6 juin 2013

La Plateforme Maladies Rares à Paris: qu'est-ce que c'est?
 

 
 
La formation annuelle qu'offre Orphanet aux documentalistes scientifiques de ses pays partenaires se fait dans les locaux de la Plateforme Maladies Rares à Paris. C'est un ancien hôpital reconverti pour héberger les bureaux de:
 
- Orphanet
- Alliance Maladies Rares (regroupement des associations de maladies rares en France)
- Maladies Rares Info Services (service d'information sur les maladies rares)
- Fondation Maladies Rares (dédiée à la recherche)
- et Eurordis (regroupement des associations de maladies rares de l'Europe)
 
Donc, tous les organismes qui se consacrent aux différents aspects des maladies rares sont réunis sous un même toit! C'est génial pour la collaboration et l'intégration des différents services et surtout pour la concertation sur les politiques de maladies rares en France.
 
 
Gail Ouellette, Regroupement québécois des maladies orphelines
6 juin 2013


mercredi 5 juin 2013

Voyage à Paris: mission de coopération France-Québec pour le projet Orphanet-Québec (1)

 
 Mercredi 5 juin 2013
Journée de formation pour les documentalistes scientifiques d'Orphanet
 
Dans le cadre du projet de coopération France-Québec pour le projet Orphanet-Québec, les membres de l'équipe québécoise en sont à leur dernière mission à Paris à la Plateforme Maladies Rares où sont situés les locaux d'Orphanet. Gail Ouellette, directrice du Regroupement québécois des maladies orphelines (RQMO) est coordonnatrice du projet, Nancy Anoja est la documentaliste scientifique et le Dr Serge Melançon en est le coordonnateur médical.
 
Le Québec est l'un des pays partenaires du portail international Orphanet (www.orpha.net). Le projet Orphanet-Québec est un projet RQMO avec comme partenaire le Département de génétique médicale du Centre universitaire de santé de McGill. Il est un projet subventionné par la Commission permanente de coopération franco-québécoise  et est également financé par le Ministère de la santé et des services sociaux. Ce projet consiste à répertorier les ressources du Québec en matière de maladies rares (cliniques spécialisées, organisations de patients, laboratoires diagnostiques, projets de recherche, essais cliniques, registres de patients, biobanques, etc.) et de les verser dans la base de données d'Orphanet. Ces ressources sont ensuite disponibles à tous à travers le monde via Internet.
 
Mercredi le 6 juin, a débuté la formation annuelle des documentalistes scientifiques des pays partenaires d'Orphanet. Nous y étions. L'équipe d'Orphanet nous a présenté beaucoup de nouveautés pour l'année à venir en matière d'entrée de données pour  simplifier la tâche des documentalistes et des professionnels qui soumettent des activités ou services au portail Orphanet. Ainsi, les professionnels de la santé, des laboratoires et de la recherche pourront éventuellement entrer eux-mêmes les mises-à-jour ou modifications à leurs activités inscrites dans la base.
 
 
 
 
Au centre: Nancy Anoja, documentaliste scientifique pour Orphanet-Québec;
 à droite: Susan Rogers, documentaliste pour Orphanet-Canada
 
 
 
 
Gail Ouellette, directrice RQMO et coordonnatrice Orphanet-Québec
 
 

 

 


mardi 4 juin 2013

Enfin un "Orphan Drug Act" au Canada?

ENFIN UN "ORPHAN DRUG ACT" AU CANADA?

À Montréal, hier lundi le 3 juin 2013, a eu lieu une réunion de consultation sur "Un cadre règlementaire canadien pour les médicaments orphelins", une sorte de "Orphan Drug Act" comme les Américains ont instauré en 1983 et les Européens en 2000. Cette réunion, organisée par le Canadian Organization for Rare Disorders et Santé Canada, a réuni des représentants d'organisations de patients, des Instituts de recherche en santé du Canada, de l'Institut d'excellence en santé et en services sociaux (INESSS) du Québec, de l'industrie pharmaceutique et des chercheurs. Le but était de prendre connaissance et discuter d'une proposition d'un cadre règlementaire pour les médicaments orphelins au Canada (voir résumé du Cadre ci-dessous).

L'objectif de ce cadre règlementaire est "d'établir un cadre complet qui permettra aux Canadiens d'avoir accès aux médicaments orphelins sans compromettre la sécurité des patients. Le cadre s'attaquera aux défis uniques de l'étude de petites populations de patients et harmonisera les activités réglementaires du Canada avec celles des partenaires internationaux."

Contenu du cadre:
- Désignation de médicament orphelin
- Avis scientifique et avis concernant l'élaboration de protocoles cliniques
- Échange d'information facilité pour favoriser la transparence
- Obligations en matière de surveillance après la mise en marché
- Mesures incitatives pour le développement de médicaments, y compris l'exclusivité commerciale, une réduction des prix à payer et un examen prioritaire des demandes.

Santé Canada vise à présenter ce règlement à la Chambre des communes à Ottawa au cours de l'automne prochain.
 
Il a aussi été question à cette réunion d'accès aux médicaments orphelins, surtout la question du remboursement par les assurances publiques et privées. Le cadre règlementaire ne touche pas le remboursement qui dépend d'une décision de chaque province suite aux recommandations d'un comité d'évaluation fédéral ou de l'INESSS au Québec.
 
Le Regroupement québécois des maladies orphelines a présenté ses préoccupations face à l'absence d'un cadre d'évaluation spécifique pour les traitements pour maladies rares à l'INESSS (cadre dont il était question dans la Politique du médicament du Québec en 2007). Le cadre d'évaluation actuel n'est pas adapté aux médicaments orphelins étudiés sur des petits nombres de patients et qui concerne des maladies rares peu étudiées. La conséquence est que plusieurs médicaments soumis par les manufacturiers sont refusés, car l'INESSS déclare qu'ils ne répondent pas à  leurs critères de valeur thérapeutique ou que les médicaments sont considérés trop chers pour la valeur thérapeutique apportée.

Résumé du Cadre règlementaire proposé pour les médicaments orphelins au Canada

-          Désignation d’un médicament orphelin : enfin le Canada entamera le pas de nombreux autres pays et offrira des avantages et incitatifs aux compagnies qui veulent développer un médicament pour une maladie rare.  Ces derniers pourront faire la demande pour une désignation orpheline. Les avantages de cette désignation incluraient : conseils scientifiques et avis sur les protocoles d’essais cliniques, révision prioritaire, réduction des frais pour petites et moyennes entreprises et exclusivité de marché de 8 ½ années pour médicaments innovateurs qui incluent les résultats d’essais cliniques pédiatriques.

-          Demande d’avis de Santé Canada : le commanditaire du médicament avec désignation orpheline pourra faire une requête auprès de Santé Canada pour obtenir des conseils scientifiques et des  avis sur les protocoles d’essais cliniques étant donné les défis spécifiques des études de maladies rares.  Ces conseils pourront être communiqués à un stade précoce du développement du médicament, augmentant ainsi la possibilité de succès au stade de demande d’autorisation de mise en marché.

-          Avis d’experts et de représentants de patients : durant le processus de demande d’une désignation orpheline, Santé Canada pourra solliciter l’avis de cliniciens, de chercheurs et d’agences de régulation semblables d’autres pays. Les représentants de patients pourraient aussi donner la perspective des patients sur la sévérité de la maladie ou sur leurs besoins sur le plan thérapeutique.

-          Demande d’autorisation de mise en marché : il faudra faire la preuve d’enregistrement de l’essai clinique dans un registre publique. Il y a aura révision prioritaire des demandes de mise en marché pour les médicaments orphelins.

-          Obligations pour la période post-mise en marché : le manufacturier devra présenter un plan de surveillance post-mise en marché pour l’évaluation continue des bénéfices, risques et incertitudes liés au médicament.